David Fischer et sa femme Emma, la cinquantaine tous les deux, forment un couple amoureux et harmonieux. Emma a quitté Londres il y a vingt-cinq ans pour suivre David au Danemark, où il mène une carrière d'avocat. Elle-même peint en dilettante dans l'atelier aménagé au fond du jardin, sans désir de public ou de reconnaissance. Leur grand fille Zoé a elle aussi embrassé une carrière artistique et s'apprête à exposer pour la première fois.
Un matin David découvre une croix gammée peinte sur sa boite aux lettres, et cet incident le perturbe plus que de raisons, lui qui s'est détaché de ses origines. Zoé annonce à ses parents son histoire d'amour avec un jeune pakistanais, qu'elle désire leur présenter. Une amie annonce avec légèreté à Emma sa décision d'avorter et de quitter son compagnon.
Tant de micros événements qui vont amener David et Emma à se questionner sur leur univers. L'auteur alterne passé et présent, nous liant ainsi intimement aux personnages, à leur histoire et à leurs aspirations. Sans nécessité de trop en faire, Jens Christian Grondhal nous immisce au coeur d'un couple : de ses habitudes et de sa tendresse, mais aussi des doutes et des frustrations qui, une fois soulevés, viennent gripper le rouage de cet amour.
Il ne se passe pas grand-chose dans ce roman, mais j'ai aimé la densité du style, la justesse du ton, et le fait que l'intrigue psychologique se mêle à une réflexion plus globale sur notre société. Les questionnements identitaires sont bien saisis, et les personnages attachants. J'ai eu un peu de mal à les quitter...
Un roman pioché chez Brize, et un auteur que je relirai !
Céline
"Il était surpris de l'entendre radoter ainsi sur les musulmans. Il était étonné car, durant toutes ses années, il l'avait soupçonné de nourrir un peu d'antisémitisme, comme un animal de compagnie, tout au fond du sous sol muet de sa personnalité."
"Était-ce de la vertu ou de la paresse ? Avant David, elle était sortie avec à peine deux ou trois types. C'était la nudité envahissante dans les médias qui lui rappelait qu'un homme pouvait ne pas ressembler à celui qu'elle avait épousé. Était-ce de l'amour ? C'était aussi de l'amour, mais c'était d'abord la vie. La vie qui avait continué avec eux sans les renverser dans son élan. "
"Je n'aurais pas cru que les gens deviendraient aussi obnubilés par leurs fichues racines, et par l'endroit "d'où ils viennent". Ce n'est pas pour moi. Comme s'il n'était pas plus intéressant de se demander où l'on va, où l'on pense aller. "
"Emma doutait que l'on puisse saisir les jeunes simplement en se souvenant de sa propre jeunesse. Il y avait des ruptures et des failles entre les générations, et elle était parfois étonnée par la manière dont sa fille prenait les choses."
"Nous sommes sans domicile fixe, le monde entier est sans abri si nous ne parvenons pas à nous sentir chez nous avec les autres."
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