Elle a quatorze ans presque quinze, et les vacances sur l'île de Ré avec ses parents et son petit frère s'annoncent déjà d'un ennui profond. Plutôt que cette maison qu'ils ont du mal à payer, elle aurait préféré aller au camping, au milieu d'autres adolescents. Car cet été, il faut qu'il se passe quelque chose... Mal dans son corps changeant mais trop maigre encore, elle pense au sexe même si elle n'a encore jamais embrassé de garçons. Mal dans sa vie aussi, car elle estime ses parents bofs et pauvres malgré leur aspiration à une vie bourgeoise. Elle a honte d'eux et honte d'en avoir honte. Seul son petit frère, complice de jeu et de rire, la relie encore à cet univers qu'elle cherche à fuir.
Un été, presque rien ne se passe et pourtant tout est dit de l'adolescence. Ou plutôt d'un moment précis de l'adolescence, ce moment juste avant d'avoir trouvé l'aisance et l'arrogance de la jeunesse, ce moment juste au sortir de l'enfance.
L'envie, les questionnements, la solitude l'obsèdent, l'étouffent. Elle voudrait faire partie de ses bandes de jeunes riants, beaux et bronzés qui passent leur été à flirter et à nager mais elle n'a pas les codes, le physique, l'origine social. Elle est cruellement consciente du côté "prolo" qui lui colle à la peau.
Les errances de cette tout jeune fille résonnent avec justesse et nous plongent dans des tourments oubliés depuis longtemps... Cette plongée dans la langueur adolescente comporte tout de même quelques longueurs, mais c'est propre aussi à l'ennui adolescent (plus assez petit pour se distraire avec des jeux, pas encore assez grand pour mener sa propre vie et suivre ses envies...).
J'ai terminé ce livre pleine de nostalgie, et en même temps heureuse de ne plus être plongée dans tous ces émotions si envahissantes et incontrôlables.
Un extrait m'a beaucoup amusée car j'ai fait la même scène à ma famille à 14 ans, en même temps j'espérais croiser mon flirt de l'été et ils se promenaient en cape de pluie en plein Saint Jean de Luz ! La honte ! Je me souviens parfaitement de marcher devant d'un pas rapide, trempée dans mon sweat à capuche en coton, pour être sûre de ne pas être assimilée à ces clowns en plastique (dont je fais partie maintenant, je l'avoue ;-)) : "Elle contrôle sa vitesse, se retourne pour voir si personne ne vient derrière avant de jeter un coup d'oeil devant. Il ne faut être ni trop loin ni trop près, il ne faut pas qu'on les confonde elle et eux, tout en laissant penser malgré tout qu'il s'agit d'une famille - sinon ils demandent, Pourquoi tu ne veux pas marcher avec nous."
Une lecture qui touche au coeur de l'adolescent en proie au doute, à la solitude et au désir que nous avons, pour certains, été.
Pioché chez Clara, et chez Cuné !
Céline
" Qu'est-ce que je vais devenir. Qu'est-ce que je vais devenir, et chaque seconde qui passe qui m'enlève une vie possible. Il ne faut pas perdre de temps. Prendre le train en marche , tout faire pour ne pas laisser filer le dernier wagon en restant sur la quai. Et toutes ces choses pour quoi il est déjà trop tard."
"C'est une histoire parmi tant d'autres, qui fait partie des contes familiaux sur lesquels tout le monde s'accorde pour enfermer irrévocablement la personnalité de chacun dans une forme au pochoir-ce genre de truc complètement circonscrit et figé et tuant."
Ce n'est pourtant pas faute de lire Clara et Cuné, mais je suis complètement passé à côté de celui-ci. Il m'a l'air d'être tout à fait ma tasse de thé, même si je ne suis pas certain que ce soit du meilleur tonneau pour redonner du soleil à l'âme.
Je le note illico et envisage même d'aller le chercher sous peu.
Merci d'avoir réparé mon étourderie.
Rédigé par : In Cold Blog | 07 octobre 2014 à 15:44
C'est à ça que ça sert les retardataires ;-) Pour ce qui est de réchauffer les coeurs, il y a mieux mais en même temps c'est avec soulagement qu'on réalise qu'on est passé par là, et que ma foi, on a survécu !!!
Rédigé par : Céline L. | 07 octobre 2014 à 15:50
Tu m'as fait rire avec tes "clowns en plastique" !
Rédigé par : Brize | 07 octobre 2014 à 21:08
Ah oui il fallait les voir avec leurs capes vert décathlon faire des grimaces pour me mettre la honte ;-)
Rédigé par : Céline L. | 08 octobre 2014 à 11:00
J'attendrais tranquillement le poche ! :)
Rédigé par : cathulu | 09 octobre 2014 à 17:05
J'adore ton anecdote.
Rédigé par : Valérie | 09 octobre 2014 à 18:24
Je le note, c'est vraiment ce que tu dis, cette période où on sort de l'enfance et ou on n'est pas encore dans la jeunesse (et où on a honte de nos parents). D'habitude je n'aime pas les romans sur l'adolescence, mais là, ce que tu dis me tente beaucoup...
Noté
Rédigé par : sous les galets | 10 octobre 2014 à 07:00
Une roman sur l'adolescence qui a l'air de sonner juste, ce n'est pas si souvent. Du coup je suis plus que tenté !
Rédigé par : Jerome | 10 octobre 2014 à 12:33
@Cathulu : c'est l'avantage des livres, ils ont tout leur temps !!! :-)
@Valérie : Avec le recul, c'est un très bon souvenir...
@Galéa : c'est un roman sur l'adolescence mais pas destiné aux adolescents, il est profond, juste et l'auteur a du recul sur cette période. Cette ébullition de sentiments, mêlée à l'ennui, est parfaitement décrite !
@Jerome : Je pense qu'il pourrait te plaire !
Rédigé par : Céline L. | 13 octobre 2014 à 16:27
Ton billet est fort tentant ! Noté.
Rédigé par : lewerentz | 16 octobre 2014 à 18:36
Je pense qu'il pourrait te plaire ;-)
Rédigé par : Céline L. | 21 octobre 2014 à 11:32
mouais, pas tellement envie d'être replongée dans ce monde...
Rédigé par : Violette | 23 octobre 2014 à 13:50
Je comprends, on est pas mécontent de ne plus être plongé dedans :-)
Rédigé par : Céline L. | 27 octobre 2014 à 14:31