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"Bonheur fantôme", de Anne Percin

   A 28 ans, et du jour au lendemain, Pierre a tout plaqué : Paris, son amour, ses amis, les photos de mode. Dans une petite maison au cœur de la Sarthe, il vit de brocantes, entouré de vieux objets, de chiens adoptés et des vieilles chansons romantiques françaises qu'il affectionne tant. Il écrit aussi, une biographie de Rosa Bonheur, peintre de paysages bucoliques ayant aimé les femmes. Le jeune homme se cache, se protège, fuit. Peu à peu, au fil d'un introspection tour à tour drôle, futile, dramatique, subtile, l'on découvre les secrets qui l'ont poussé à ce retranchement : un frère jumeau perdu trop jeune, et surtout R.. R., charismatique et aimant, R. le reporter motard avec qui il vivait depuis 10 ans. De cet amour qu'il a brisé par peur de le perdre, il dévoile la force, la tendresse et les blessures, et peut-être, l'avenir.

  Ce roman, vibrant, vivant, drôle et douloureux m'a séduite dès les premières pages. Le narrateur est attachant avec ses fantômes, ses lâchetés et son romantisme obsolète. Car son histoire est aussi celle d'un amour fou, terriblement fort, et irremplaçable. L'introspection de Pierre, truffée d'anecdotes amusantes et parfois loufoques, est subtile et troublante. L'écriture d'Anne Percin a achevé de me convaincre que je n'avais pas lu de roman aussi poignant depuis un bon moment...

Un vrai coup de coeur au milieu de la rentrée !

Céline

Bonheur Fantôme, Anne Percin

Le Rouergue, coll La Brune, 16,50

"Déroute sauvage", de Guillaume Guéraud

  Dans le car pour rejoindre l'Espagne, les élèves de 4ème du collège Paul Eluard dorment, écoutent leur mp3, les garçons tentent vainement de draguer les filles, les filles parviennent à feindre l'indifférence... Un voyage scolaire linguistique qui débute comme tant d'autres... Mais en pleine nuit, au coeur des Pyrénées, l'escapade tourne au cauchemar. Le car quitte la route, bascule, et les passagers se retrouvent sous un amas de tôle et de sang quelques mètres plus bas... Les rescapés sortent peu à peu des décombres... Mais l'horreur ne fait que commencer : trois sauvages sanguinaires les traquent dans la nuit...

  Avec beaucoup d'humour et d'ironie, l'auteur nous livre une course poursuite sombre et décoiffante à travers les Pyrénées. Entre le roman noir et la parodie de Souviens-toi l'été dernier, Déroute sauvage nous tient en tension pendant 140 pages. En intercalant à son récit des passages reprenant des documents de Lycée (avis de colle, dissertations, consignes de voyage, carnets intimes...), Guillaume Guéraud rend ses personnages juste assez attachants et son histoire juste assez crédible pour nous faire un peu peur... Mais pas trop non plus : dès la lecture de la citation en incipit, on saisit le ton du livre : "Je mentirais si je ne pensais pas déjà m'être amusé à raconter n'importe quoi juste pour les faire marrer.", Deportivo. 

  Si vous voulez découvrir l'univers déjanté de l'auteur, vous pouvez visionner ses petites leçons d'écriture sur le blog de Citrouille, les libraires sorcières. Vraiment très drôle !

Céline

Déroute sauvage, de Guillaume Guéraud / Editions du Rouergue, coll. Doado Noir, 8 €

"Bienvenu au club" et "Le cercle fermé" de Jonathan Coe

   

 

 

 

 

 

 

  

  Benjamin Trotter, Philippe Chase et Doug Anderton ont quinze ans, ils sont inséparables et n'ont que deux obsessions : la musique et les filles. Les touchant de près ou de loin, des événements comme les attentats de l'IRA ou les grèves sociales dues aux fermetures d'usine vont bientôt les embarquer dans un monde qui dépasse leur univers de collégien : celui de l'Angleterre des années 70. 30 ans plus tard (dans Le Cercle fermé), nous retrouvons les trois amis confrontés à leurs obligations professionnelles et familiales, leurs désillusions, l'invasion de l'Irak. 

  Mêlant le détail et le politique, le burlesque et le tragique, Jonathan Coe nous emmène dans une fresque sociale de l'Angleterre des années 70 à nos jours tout en nous passionnant pour le destin de personnages denses et complexes. J'ai lu ces deux romans d'une traite, dévorant les pages avec une frénésie presque boulimique. A des passages drôles et incisifs (comme les pages satiriques du journal du Lycée), se succèdent des réflexions de société ou des incidents plus tragiques. L'auteur ne tombe jamais dans le mélo, mais parvient à nous faire ressentir l'émotion juste par son sens de la description et du réalisme. J'ai retrouvé dans ce diptyque le plaisir de suivre la vie des héros et de s'identifier à leurs sentiments, et j'ai ressenti cette légère frustration caractéristique de la lecture de bons romans en fermant la dernière page, cette envie que l'histoire se poursuive... Alors on traîne un peu pour ouvrir un nouveau roman, et on laisse quelques heures de sursis à ces personnages qui nous ont tant séduits. 

Céline

PS : Milou, il faut absolument que tu tentes ces deux titres, on y puise le même plaisir qu'à la lecture d'un bon Irving !