"Le cadeau qu'on offre aux débutantes pleines d'enthousiasme et de zèle pour qu'elles comprennent que l'Education nationale était à l'image de la vie, un monde sans pitié où il fallait avant tout s'adapter. Pour qu'elles réalisent aussi que la vocation, c'était un mythe, un délire romantique, qu'il fallait vider de ses idéaux pour appréhender la substantifique moelle du métier, apprendre à survivre."
Emma, enseignante débutante, est nommée à l'école des Acacias, dans un quartier défavorisé de Toulouse.
"L'école des Acacias. C'est là que va se passer l'histoire. On peut s'imaginer qu'elle existe vraiment, pour se faire peur."
De septembre à juin, elle raconte son quotidien, ses élèves, les difficultés qu'elle traverse et surtout les drames que les enfants apportent en classe avec eux. Le petit Michel et les traces de scarification sur ses bras. Dimitri, un garçon qui aboie. Myriam et ses parents alcooliques. Molly et son œil poché. Yaël qui, à dix ans, s'oublie encore régulièrement. Et les signaux qu'elle n'avait pas su voir derrière les yeux voilés et fatigués de Ryan.
Pleine de révolte et d'énergie, elle cherche à les aider, quitte à parfois se laisser déborder, quitte à se disputer avec Aucalme, le directeur pragmatique qui en a vu d'autres, quitte à parfois se tromper.
Car la limite entre l'enseignement et le social est floue lorsque l'on partage le quotidien d'enfants qui souffrent, qui apportent leurs bleus à l'école, qui tapissent au fond d'eux des tragédies indicibles.
Ce serait presque trop tous ces destins malmenés qui s'accumulent, on aimerait se dire que c'est irréaliste, ne pas y croire. Mais il y a la rencontre d'Emma avec Mathieu, et cette histoire d’amour débutante apporte une légèreté, un souffle nécessaire au récit. Et puis ces instants de grâce qui s’abattent parfois sur la classe.
"Mais elle a eu le mérite d'exister, cette seconde, et rien que pour elle, être enseignant en vaut la peine."
Ce livre permet aussi d'apporter un vrai regard, profond et remuant, sur les conditions d'un métier trop souvent décrié. De mieux saisir le quotidien de ces instituteurs qui, en plus de former les élèves, doivent gérer des situations familiales et sociales complexes.
"Ne pas s'attacher aux gens.
Simplement les aimer. Les supporter. Les accompagner. Et les laisser partir. "
Un roman nécessaire et percutant.
Céline
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